الكرنك (Karnak Café)

par | 9 Déc 2017 | Art – Littérature

Je ne suis jamais allé en Egypte, et cela reste un de mes rêves. Mais parfois, une image suffit à vous emmener en voyage…

Le quartier du bazar de Khan El Khalili est l’une des principales attractions du Caire, aussi bien pour les touristes que pour les Égyptiens. Ce n’est de toute évidence pas le quartier le plus calme de la ville. Entre les hordes de touristes, tous ces vendeurs semblant si doués dans l’art de l’agitation créative, et l’impossibilité de stationner, s’y rendre est vraiment une expérience inoubliable au cœur de la capitale.

Ceux qui aiment cet endroit ne peuvent méconnaître son secret le plus raffiné, le café de Naguib Mahfouz.

Naguib Mahfouz a été le premier écrivain en langue arabe à recevoir, c’était en 1988, le prix Nobel de littérature. Il est né au Caire en 1911 et a commencé à écrire quand il avait dix-sept ans. Il est mort en août 2006.

Ses quelques quarante romans et centaines de nouvelles vont de la revitalisation des mythes anciens à des commentaires subtils sur la politique et la culture égyptienne contemporaine. De ses nombreuses œuvres, la plus célèbre est la trilogie du Caire, composée de Promenade du Palais (1956), Palais du désir (1957), et Sugar Street (1957), qui raconte l’histoire d’une famille du Caire à travers trois générations, de 1917 à 1952.

Karnak Café a été écrit en 1974 et transformé en un film du même nom un an plus tard, mettant en vedette les figures principales du cinéma égyptien de l’époque.

Dans un café du Caire dans les années 1960, un ancien danseur de ventre légendaire règne affectueusement sur une famille bruyante d’habitués, y compris un groupe d’étudiants universitaires idéalistes. Un jour, on apprend une vague d’arrestations, et trois des étudiants disparaissent : Hilmi, l’amant de la gérante, son ami Ismail, et la jolie petite amie d’Ismail Zaynab.

Quand ils reviennent, plusieurs mois plus tard, apparemment indemnes, ils ont subtilement et profondément changé. Ce n’est que des années plus tard, après que leurs vies aient été à nouveau brisées, que le narrateur rassemble les histoires horribles des jeunes et apprend comment le gouvernement les a utilisés les uns contre les autres. A la fin du roman, leur tortionnaire lui-même pénètre dans le café et se trouve parmi ses anciennes victimes, revendiquant le droit d’adhérer à leur monde de la désillusion.

La page dédiée à Naguib Mahfouz, sur le site officiel du prix Nobel, met l’accent, à côté de la poésie, sur la « tradition égyptienne ancienne de narration qui s’exprime dans une multitude de formes orales différentes racines ». Cette tradition du conteur public, une institution culturelle depuis des siècles, est restée vivante jusqu’à aujourd’hui. Le roman égyptien moderne naquit d’une libération progressive de l’oppression par les puissances étrangères, après l’occupation par les armées de Napoléon au début des années 1800, et l’émergence d’une classe intellectuelle ouverte au Monde.

L’Egypte abrite à Alexandrie, à 230 kms du Caire, le siège de la Fondation euro-méditerranéenne Anna Lindh pour le dialogue entre les cultures. Créé en 2005 en tant que réseau d’organisations de la société civile dédiée à la promotion du dialogue interculturel dans la région méditerranéenne, c’est à mon sens la seule institution que le Partenariat euro-méditerranéen ait su faire vivre. Le chois de son nom vise à honorer Anna Lindh, la ministre suédoise des affaires étrangères qui a été assassinée en 2003.

La Fondation Anna Lindh se concentre sur les activités essentielles au dialogue humain et social : l’éducation et la jeunesse, la culture et les arts, la paix et la coexistence, les valeurs, la religion et la spiritualité, les villes et les migrations, les médias.

Prenons un thé ensemble au café de Naguib Mahfouz ?


Iconographie : Café de Naguib Mahfouz, Le Caire, Egypte, 22 Novembre 2017, photographie de Amal Merzouk.